Nous entendons déjà les récriminations de certains et certaines : "presque trois mois qu'ils sont partis et rien sur les arts de bouche, pas un mot ou presque sur leurs découvertes gastronomiques". Nos détracteurs ont tout à fait raison, voyager c'est aussi partir à la rencontre d'autres arts de vivre.
Voici donc un épisode hédoniste et épicurien.
Le Népal.
A vrai dire, nous sommes restés essentiellement dans la haute montagne, la ou ne poussent plus guère que des pommes de terre et une sorte de salade à cuire ressemblant aux épinards, puis au dessus de 4000 m dans le désert alpin, plus rien du tout. La quasi totalité des aliments est acheminée à dos de porteurs depuis les vallées situées pour certaines à 10 jours de marche.
Les repas sont par conséquent rudimentaires, surtout constitues de féculent, pommes de terre, pâtés (en particulier les "momos" sortes de raviolis fourres aux légumes ou à la viande quand il y en a, et réalisés sur place), un peu de fromage de yack, ou plus précisément de l'animal issu du croisement d'un yack et d'une vache. De toute façon, on ne pratique pas le trekking dans l'Himalaya a la recherche de plaisirs gastronomiques et, les effets conjugués de l'altitude, du froid et de la fatigue font qu'on mange peu.
Dans la vallée de Kathmandu où nous sommes restés moins longtemps que prévu après avoir été bloqué 4 jours à Lukla, un coup de cœur pour le restaurant "Helen's" qui sert un poulet Tikka très original accompagné d'une sauce verte où dominent les saveurs de coriandre. Le summum restera toutefois un plat traditionnel tibétain dont nous avons oublié le nom (mais nous pouvons retrouver le restaurant dans un cadre de verdure à la périphérie du quartier Thamel) : un cocktail de viandes, de légumes à cuire soi même dans un chaudron chauffé à la braise servi avec du riz et du pain tibétain – un régal accompagne de la bière locale "Everest".
Hong Kong.
Il y a peu à en dire du point de vue du point de vue gastronomique. Nous y avons goûté une cuisine cantonaise traditionnelle donc aux saveurs plus parfumées que pour les autres cuisines chinoises, mais dans l'ensemble les cartes des restaurants manquent un peu d'originalité et de diversité. Nous y avons de toute façon profité du caractère assez cosmopolite de la ville pour diversifier nos repas : chinois, italiens, indiens, japonais, continentaux.
Une mention spéciale pour la ville de Macao ou l'on découvre une cuisine extraordinaire par son métissage qui mêle les influences chinoises, portugaises et africaines (les anciennes colonies portugaises) en particulier mozambicaines. La cuisine de Macao est un feu d'artifice pour le palais.
Le Japon.
A l'évidence la cuisine la plus subtile du monde avec la notre. Nous avons surtout fréquenté les bars à sushis, d'abord parce que nous adorons les sushis, shashimis et autres makis, mais également parce qu'il s'agit du mode de restauration le moins onéreux (le coût de la vie est élevé au Japon). Nos incursions vers d'autres types de plats ne nous ont pas déçus. Notons toutefois que, plus que toute autre cuisine, précisément en raison de sa subtilité, la gastronomie japonaise nécessiterait une éducation de nos palais occidentaux pour en apprécier toutes les nuances, plus encore que pour des cuisines telles que la chinoise ou l'indienne, certes éloignées de la notre mais que nous sommes nettement plus prépares à aborder.
La gastronomie japonaise reste de toue manière un extraordinaire espace de découvertes, d'étonnements, de sensations inédites.
Plus difficile à accepter : le thé vert qui accompagne traditionnellement tout repas japonais. Il introduit, selon notre culture, selon nos critères, un déséquilibre du repas. Il manque à l'évidence le complément indispensable qui soutient, qui rehausse le plat présente et va lui permettre d'exprimer tout son caractère. Pour rester local on peut bien entendu accompagner le repas d'une bière "Asa hi" ou "Ki-Rin" (assez moyennes au demeurant) mais cela reste un pis aller.
La Nouvelle Zélande.
Première surprise : alors que les maoris constituent 15 pour cent de la population, qu'ils représentent le peuple originel et fondateur du pays, que leur présence est importante dans la culture (à défaut de l'être dans la vie économique), ils sont totalement inexistants sur les tables néo zélandaises ; aucune présence de gastronomie traditionnelle maorie, aucune trace de métissage culinaire.
La cuisine locale est donc essentiellement anglo-saxonne : c'est tout dire. Les anglo-saxons accorde peu d'importance à la table (même si nous connaissons personnellement des exceptions). Autrement dit, ils cuisinent triste : céréales, sandwiches, légumes peu cuits, viandes bouillies ou calcinées, sauces innommables (sauce à la menthe, Worcester...). Le rayon fromage des supermarchés conduirait au suicide un bataillon de comiques troupiers. On y trouve entre le camembert bavarois, le bleu du Danemark et la feta bulgare, une sorte de fromage dense et compact, vendu en briquettes d'une livre ou d'un kilo qui vous serviraient plutôt à refaire le mur de votre jardin qu'à égayer votre table.
Heureusement, il y a le rayon fruits et légumes : frais très variés nous y avons trouvé d'excellentes fraises (toutefois pas au niveau de la Plougastel) et surtout des abricots qui nous ont réconciliés avec ce fruit aujourd'hui très dégradé en France (à l'exception du Roussillon). La grande déception concerne les kiwis (les fruits, pas les Néo-zélandais ni les oiseaux) : raides, acides, peu goûteux. Nous n'en avons trouvé qu'une espèce acceptable, les "Zesprit" verts (évitez les "gold") produits dans le centre de l'île du nord. A propos des kiwis (les Néo-zélandais, pas les fruits ni les oiseaux), lorsqu'au début du XXèmme siècle les All Blacks firent leur premier déplacement hors de Nouvelle Zélande et qu'ils durent se choisir un emblème, ils refusèrent le kiwi (l'oiseau, pas le fruit ni le Néo zélandais) sous prétexte qu'à l'époque ils le mangeaient. Il n'y a pourtant pas de honte pour nous qui avons choisi le coq a s'identifier a un oiseau que l'on mange. Ils auraient d'ailleurs pu choisir le kiwi (le fruit, pas l'oiseau ou le Néo-zélandais) puisque les gallois ont pris le poireau (le légume, pas le motard).
Vous suivez ?
Bref, revenons à nos moutons et précisément à la viande de boucherie. Et la, c'est le grand bonheur. Nous avons goûté ici des morceaux d'agneau et de bœuf surprenants par leur tendresse, leur goût, la richesse de leurs saveurs. Rien à voir avec les agneaux de Nouvelle Zélande exportés en France, souvent nerveux et filandreux qui deviennent gris à la cuisson. Nous n'avons pas mangé de porc à l'exception d'un jambon sucré que nous essaierons d'oublier très vite. Nous avons préparé pour des sommes modiques (autour de 7 euros le kilos) des BBQ dont nous garderons longtemps le souvenir.
L'autre satisfaction culinaire concerne les produits de la mer : moules vertes de 8 à 10 cm, charnues, à la saveur très prononcée, coquilles Saint-Jacques (pectem maximus ou pétoncles ?), poissons de toutes variétés. Malheureusement pour ces derniers il est totalement impossible de les déguster autrement que frits dans une pâte à beignet (façon "Fish & Chips"). Profitons en pour répondre à Joseph. Les baleines ont été chassées pendant des siècles surtout pour en tirer de l'huile. Les Néo zélandais ont cessé de le faire en 1964 et actuellement tous les pays (à l'exception peut être du Japon) respectent l'interdiction de les chasser. A notre connaissance il est donc impossible de manger de la baleine et nous ignorons d'ailleurs s'il s'agit d'un animal comestible.
Et pour accompagner tout cela ? La Nouvelle Zélande se flatte d'être un pays de bière comme le plupart des pays anglo saxons. Pourtant, comme dans tous ces pays, il n'y a pas de quoi se retourner : on est dans le registre de l'insipide Budweiser. Mais, à part les belges et dans une moindre mesure le Nord/Pas de Calais, la Bretagne et l'Irlande, qui sait brasser de la bonne bière ?
Côté vins, quelques bonnes surprises : peu de rouges Néo zélandais (ils en importent beaucoup d'Australie) mais des blancs assez gouleyants quoi que parfois un peu moelleux. Toutefois, comme tous les pays tardivement venus au vin, on n'y produit que des cépages francs et par conséquent des vins qui n'ont pas la subtilité de nos assemblages, même si les lois du marché conduisent nos viticulteurs a uniformiser leurs productions (libéralisme, tu nous détruiras tout !). Alors, en attendant les délices de la cuisine polynésienne, à votre santé et bon appétit.